Chacun d’entre nous est capable  d’objectiver les mutations que traverse aujourd’hui la communauté humaine.

L’avènement des nouvelles technologies associé à la globalisation nous font d’ailleurs presque toucher du doigt ou en tout cas matérialisent une réalité qui, sans doute, échappe à la plupart d’entre nous, à savoir l’interdépendance.

Cette interdépendance est le plus souvent évoquée à travers l’expression : « l’effet papillon ». Celle-ci laisse entendre qu’un simple battement d’ailes d’un papillon pourrait déclencher une tornade à l’autre bout du monde.

« Faut voir !» diraient les sceptiques.

Or, et c’est bien malheureux, des événements , tels que la crise des subprimes, l’accident nucléaire de Fukushima et plus près de nous encore, le scandale de la viande de cheval, nous ont confronté de manière brutale aux conséquences désastreuses auxquelles peuvent conduire cette interdépendance. Car elle procède comme le ferait un catalyseur : elle accélère et amplifie les phénomènes.

Pourtant, l’interdépendance peut prendre des formes bien plus réjouissantes telles que la greffe des mains d’un ouvrier italien en 2012 par une équipe de chirurgiens à Lyon ou la victoire des Bleus lors de la Coupe du Monde de football en 2018.

Dans ces deux derniers exemples, nous pouvons affirmer que l’Intelligence Collective était à l’œuvre, cette synergie qui permet à l’intelligence de chacun des acteurs présents de créer un effet plus grand que la somme des effets attendus s’ils avaient opéré indépendamment ou de créer un effet que chacun d’entre eux n’aurait pas pu obtenir en agissant isolément. Ce constat est souvent résumé par l’aphorisme suivant « un et un font trois ». Le collectif est porteur d’un intérêt supérieur au delà des ego de chacun.

L’intelligence collective est donc à la fois une propriété naturelle du vivant social, et une nouvelle discipline de recherche.

En tant que propriété du vivant social, l’intelligence collective se manifeste et s’observe dès que des êtres vivants collaborent, intra-espèce ou inter-espèces, que ce soit en petit ou en très grand groupe.

En tant que discipline de recherche, l’intelligence collective a pour objectif de comprendre comment le vivant social fonctionne. L’intelligence collective est un sujet transdisciplinaire et à ce titre, il inclut des domaines tels que : la sociologie, l’anthropologie, l’éthologie, la psychologie, la théorie du choix social, l’analyse des réseaux sociaux, la théologie, les théories de la complexité et du chaos, la théorie de l’information, la cybernétique, la théorie des jeux, la biologie, l’économie…

Aujourd’hui, des cabinets de conseil en stratégie et management et des associations telles que le « CIRI, Collective Intelligence Research Institute » se sont emparés du sujet. Sur son site iric.fr, il est indiqué qu’elle est une association à rayonnement régional, européen et international a pour mission de développer, promouvoir, former, animer et accompagner l’intelligence collective des organisations humaines. Il y est également précisé ses grands thèmes de recherche. Par exemple :

1- Les organisations à intelligence holomidale. Il s’agit d’une nouvelle forme d’intelligence collective qui émerge dans notre espèce. Elle ne se réduit pas à échanger des idées sur le Net, à créer de nouvelles connexions dans les réseaux sociaux ou à organiser une manifestation de dernière minute. Elle est la signature du prochain tissu social où les collectifs sont capables de synchroniser des actions complexes et d’engager des projets complexes.

2-  L’holoptisme. Il s’agit de la vision qu’un individu a du collectif en tant qu’entité unifiée et cohérente.

3-  Les architectures invisibles,

4-  Les monnaies libres,

5-  Le développement personnel, …

Selon le CIRI, la résolution innovante des problèmes nécessite la mobilisation de cette nouvelle forme d’intelligence collective. Les entités sociales à intelligence collective holomidale, contrairement à celles à intelligence collective pyramidale, semblent posséder la capacité de conscience réflexive, d’auto-gouvernance, d’auto-actualisation et d’auto-évolution. De plus, créer aujourd’hui, c’est nécessairement être dans un mouvement coopératif.

En contexte d’intelligence collective holomidale, l’être s’investit dans le collectif de manière radicalement nouvelle. Il convient donc d’accompagner  l’évolution des personnes, des groupes et des organisations vers cette nouvelle forme d’intelligence.

L’apprentissage en sera probablement la voie royale. Mais un apprentissage repensé et relevant d’un paradigme qui tranche avec l’enseignement traditionnel.

Nous souscrivons totalement à cette vision des choses et notre contribution à ce projet global concernera principalement le champ de la recherche appliquée à travers le dispositif pédagogique du « Synergomètre® » (Syn. : ensemble ; Ergo : travail ; Metron : mesure). Il nous invite à repenser la formation comme le souligne très justement Arlette Mucchielli dans son ouvrage « Apprendre à coopérer » ESF Editeur.

https://www.synergometre-roger-mucchielli.eu/

Le Synergomètre®  s’inscrit dans le courant des travaux de Elton Mayo, Alex Bavelas, Harold Leavitt, Kurt Lewin, Jacob levy Moreno, pour ne citer que les principaux. Roger Mucchielli les a rencontrés aux Etats-Unis. Dès son retour, il lança les 1ères expérimentations et en 1961, il breveta la méthode. Son apport  personnel fut de mettre en évidence le facteur humain, à savoir l’importance des interactions et de leur signification sur l’évolution du groupe et de chacun en situation de coopération.

Le dispositif pédagogique du Synergomètre® poursuit deux objectifs :

– Mesurer la capacité de chacun à travailler en équipe et apprécier ses limites à coopérer,

– S’entraîner afin de développer son aptitude à coopérer…

Car comme le disait Roger Mucchielli, l’une des meilleures façons d’apprendre quelque chose est d’affronter, jusqu’à la familiarisation complète, les situations à maîtriser. Il s’inscrit résolument dans le cadre des méthodes actives qui bouleversent radicalement le statut du formateur, du formé et de la formation.

– Le formateur n’est plus « le sachant », la référence absolue mais son travail consiste à inciter les formés à l’expression. Il est miroir des participants et leur renvoie leurs manières d’être.

– Le formé a la parole pour s’informer, préciser sa pensée, ses émotions, sa stratégie, des décisions, … et pour intervenir sur ce qui se passe.

– La formation devient existentielle et vise un savoir-devenir. Elle doit permettre de révéler en chacun ce qui le fonde le plus authentiquement et de réaliser ses potentialités.

Après avoir cherché à rendre l’homme plus performant, puis plus compétent, l’éthique doit être maintenant d’aider l’homme à vivre mieux ou moins mal. Pour les entreprises, l’objectif sera de trouver les conditions permettant le comportement optimum en situation professionnelle.

 

Mariette Strub

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