Comment distinguer empathie, sympathie et apathie ?
On dit souvent qu’un dessin vaut mieux qu’un long discours.
Cependant, j’en dirais quelques mots.
Tout d’abord, il est bon de rappeler que ces 3 mots partagent le même suffixe [pathos] qui vient du latin souffrance ou ce qu’on éprouve.
Prenons maintenant l’exemple du dessin. Vous êtes allongé sur la plage et au loin, vous voyez dépasser une tête et un bras qui s’agite.
- Si vous êtes en empathie, vous comprenez la détresse du nageur sans pour autant la partager. Ainsi, avec discernement et son sang-froid, vous saurez adopter le comportement adéquat pour lui venir en aide.
- Si vous êtes en sympathie, vous partagez la détresse du nageur. Vous pourriez alors bondir sur vos jambes, allez à sa rescousse au risque de vous noyer avec elle, si vous ne savez pas bien nager.
- Si vous êtes apathique, vous n’aurez pas nécessairement perçu les signes de détresse et même si c’était le cas, votre indifférence fera le reste.
Les différentes formes d’empathie
L’empathie est la faculté de percevoir et de comprendre ce que ressent l’autre, son état émotionnel (empathie affective) ou son point de vue, ses croyances, ses intentions (empathie cognitive), tout en conservant sa propre intégrité psychologique.
Cependant, on distingue 3 formes d’empathie :
1/ L’empathie motrice ou primale
Elle serait la composante automatique du processus empathique. Il s’agit d’un mimétisme moteur, une imitation posturale et faciale involontaire, une synchronisation réflexe. C’est le cas du fou rire ou du bâillement. On pourra parler de contagion émotionnelle.
L’empathie motrice serait la brique élémentaire sur laquelle s’inscrivent les deux autres formes d’empathie.
2/ L’empathie affective ou émotionnelle
Elle désigne la capacité à reconnaître les émotions chez autrui.
3/ L’empathie cognitive
Elle désigne la capacité à se mettre à la place d’autrui, de comprendre ses pensées, ses intentions et d’anticiper son comportement.
L’empathie est un partage plus ou moins intense, mais toujours « mesuré » de l’émotion de l’autre. Sinon, nous sommes dans le registre de la contagion émotionnelle.
L’empathie, une des trois attitudes dans la relation d’aide
Carl Rogers (1902-1987) est un psychologue humaniste américain. L’approche rogérienne est une approche de la relation centrée sur la personne. Elle repose sur trois attitudes fondamentales de l’accompagnant (thérapeute, psychologue, mais aussi coach ou formateur) : l’empathie, l’authenticité et le regard positif inconditionnel.
- L’empathie permet de sentir le monde intérieur du patient et sa signification intime comme s’il était le nôtre, en n’oubliant jamais que ce n’est pas le nôtre.
- L’authenticité est l’attitude honnête de l’accompagnant. Elle suppose qu’il soit congruent et transparent. La congruence est la dimension intérieure de l’authenticité, la transparence en est la dimension extérieure.
- Le regard positif inconditionnel. On parle aussi d’acceptation inconditionnelle. Il s’agit d’accueillir le patient tel qu’il est, sans jugement, dans une attitude neutre, bienveillante et chaleureuse.
L’empathie et l’écoute active
Outre l’attitude d’empathie, l’écoute active s’appuie sur deux techniques :
- Le questionnement
Il convient de connaître les différents types de questions et de savoir les utiliser à bon escient. Plus d’informations dans la vidéo #7 (lien en commentaire). - La reformulation
La reformulation permet de montrer qu’on écoute et de s’assurer qu’on a compris. Plus d’informations dans la vidéo #6 (lien en commentaire).
Pour plus d’informations, je vous invite à aller regarder ma vidéo : A la découverte de l’écoute active
https://www.youtube.com/watch?v=wSOx6gXL4mI
Pour plus d’informations, je vous invite à aller regarder ma vidéo : Les techniques de questionnement
https://www.youtube.com/watch?v=A-Suf6AlLME
Est-ce que l’empathie ça s’apprend ?
Des recherches récentes ont montré que l’empathie est associée à certains corrélats biologiques, voire génétiques. Mais, elle est également liée à nos expériences de vie et à nos apprentissages dans un contexte affectif et éducatif, suffisamment bon, comme dirait Winnicott. (Voir lien vers ma vidéo sur la « Théorie de l’attachement », en commentaire).
À partir d’une série d’études empiriques chez l’homme et chez l’animal, Jean Decety, psychologue et neuroscientifique, a théorisé que l’empathie est un construit multidimensionnel qui reflète :
- Une capacité naturelle à partager les états affectifs des autres,
- La capacité d’adopter intentionnellement la perspective subjective d’autrui,
- La motivation de se soucier de l’autre.
3 leviers sur lesquels s’appuyer pour « apprendre » l’empathie.
De plus, si vous êtes parents, voici quelques pratiques éducatives recommandées pour développer l’empathie de vos enfants :
- Cultivez l’empathie. Soyez disponible pour eux. Ecoutez les et mettez vous à leur place. Réguler vos émotions et évitez d’être trop réactifs.
- Soyez authentique. Parlez leur avec votre cœur. Agissez et exprimez vous en accord avec vos valeurs. Donnez l’exemple. Partagez vos émotions et vos besoins.
- Soyez bienveillant et pratiquez l’acceptation inconditionnelle. Ne jugez pas, n’interprétez pas. Exprimez votre fierté. Si vos enfants se comportent d’une façon inappropriée, dites-le-leur en parlant des comportements et en restant factuel. Evitez les reproches, jugements et critiques, sur leur personne.
- Aidez les à identifier leurs émotions et celles des autres. Amusez vous à jouer à deviner les émotions des autres.
- Aidez les à se projeter intuitivement dans la situation de l’autre. Stimulez leur curiosité envers les émotions des autres.
- Aidez les à réguler ses émotions. S’ils sont submergés par leurs émotions, ayez une présence attentionnée et aimante, capable de les réconforter et de leur apporter le calme dont ils ont besoin : une voix douce et des gestes enveloppants. Une fois l’émotion canalisée, écoutez votre enfant. Proposez lui d’exprimer ses émotions et ses besoins. Toute émotion est légitime. Cependant, l’émotion ne justifie en aucun cas des actes violents comme casser ses jouets ou taper son frère ou sa sœur, par exemple.
- Développez leur intelligence émotionnelle. Encouragez les à contacter, reconnaitre et exprimer leurs émotions. Reflétez leurs sentiments.
- Développez la coopération et les actes altruistes. Il existe des jeux coopératifs dans le commerce que vous pouvez privilégier. Lorsque les enfants jouent ensemble, laissez le partage ou le prêt de jouets se produire naturellement et valorisez-le. Gratifiez vos enfants lorsqu’ils aident leurs amis, leurs grands-parents, …
Sur le sujet des relations parents-enfants, je vous invite à aller regarder ma vidéo : La Théorie de l’attachement
https://www.youtube.com/watch?v=lCmb2h0SuCI&t=15s
Quels sont les pièges de l’empathie ?
L’empathie est plébiscitée aujourd’hui et on verra dans le dernier post, ses bénéfices.
Pourtant, elle présente également quelques écueils/pièges. En voici 4 :
- La contagion émotionnelle et la détresse empathique
Les émotions ont un effet contagieux. Cependant, certaines personnes ont du mal à distinguer clairement leurs émotions de celles d’autrui. Submergées, embarqués émotionnellement, elles ne peuvent accéder à l’empathie. Cette contagion peut même conduire à une détresse émotionnelle qui peut jusqu’à nous détourner des besoins de l’autre.
- La projection
Lorsqu’on est en empathie, on se voit dans l’autre et on y reconnaît peut-être quelque chose d’une situation qu’on a soi-même vécue. On fait des hypothèses sur ce que l’autre pense et ressent. Le risque majeur alors est de croire que nos hypothèses sont nécessairement vraies.
- Le contrôle émotionnel
La détresse empathique peut déboucher sur l’évitement ou le contrôle émotionnel. Il s’agit d’une forme de répression, d’un refoulement de ses émotions car elles nous submergent ou sont vécues comme menaçantes.
- La manipulation
Dans les 8 formes d’empathie telles que définies par Daniel Batson, deux d’entre elles peuvent être utilisées par des personnes mal intentionnées et conduire à de la manipulation ou à de l’abus : connaître l’état intérieur de l’autre et se représenter les sentiments et l’état intérieur d’autrui.
Tout est donc question d’intention et peut-être de bienveillance.
Quels sont les bénéfices de l’empathie ?
Dans le MOOC, EdX Science of Happiness, dispensé par l’université de Berkeley, la question suivante est posée : l’empathie rend-elle plus heureux ?
Leur réponse est sans appel :
- L’empathie nous rend plus capable de partager la joie, la réussite et le plaisir,
- Elle nous rend plus capable d’expérimenter le plaisir collectivement,
- Elle nous rend plus proches des autres, renforce les liens sociaux, apporte des interactions plus profondes et plus significatives,
- Elle augmente la probabilité que les autres soient empathiques avec notre souffrance et nous soutiennent.
De manière plus générale, l’empathie a un avantage adaptatif, dans la mesure où elle favorise les comportements altruistes. Pouvoir se mettre à la place de l’autre permet d’éviter de le blesser physiquement ou psychologiquement étant donné que l’on peut se dire « moi, je n’aimerais pas subir cela, je ne vais pas lui infliger » et au contraire agir envers les autres tel que l’on aimerait qu’on le fasse avec moi.
L’empathie permet également de mieux réagir face aux souffrances d’autrui, ce qui maintient une cohésion dans le groupe, un sentiment d’entraide et de compréhension mais surtout une aide adaptée à la survie de l’espèce.
La capacité de se mettre à la place d’autrui et de percevoir ce qu’il ressent favorise les comportements prosociaux et évite les comportements dangereux ou agressifs.
Enfin, l’empathie renforce les aptitudes individuelles d’apprentissage et la performance des équipes.
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Alors, vous former ou former vos collaborateurs à l’empathie, ça vous tente ?
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Mariette Strub